Voilà la première œuvre terminée de la 9ᵉ édition du festival Street Art ! La muraliste Rouge Hartley a transformé le crépi du numéro 148 du boulevard Chanzy en œuvre d’art profonde et philosophique autour du mythe de narcisse, de la force des sentiments et de l’importance d’explorer le fond des choses.
Tout sourire mais un peu stressée, casque sur les oreilles, Rouge Hartley s’attaque avec énergie à la surface crépie qui borde le boulevard Chanzy. A quelques mètres de l’œuvre de Mohamed El Gacham qui s’était inspiré de la vie des habitants pour créer une magnifique suite de tableaux, c’est cette fois la présence de l’eau qui a été la pulsion créatrice de l’artiste française. « Je ne connaissais pas cette partie du littoral mais la présence de l’eau m’est apparue centrale » explique Rouge Hartley. « C’est une thématique que je travaille également en atelier en ce moment. Pour ce mur, je me suis inspiré d’un tournage performatif réalisé il y a quelques mois autour d’un lac. J’ai repéré un geste qui m’a marqué et qui faisait pour moi référence au mythe de Narcisse. »
Issu de la mythologie grecque, Narcisse est un chasseur d’une grande beauté qui refuse toutes les avances avant de tomber amoureux de sa propre image en se regardant dans un cours d’eau. « Je me suis rendu compte que je n’avais aucune représentation du moment où Narcisse s’épouse lui-même. On a toujours l’image où il se mire mais jamais celle où il s’immerge et va vers la mort. »
Voilà pour la première idée. Mais la fresque qui a vu le jour face à la Liane va beaucoup plus loin. « A un moment, tout s’est décalé dans mon esprit » reprend la muraliste. « Je me suis demandé ce qu’il se passerait s’il s’agissait de deux femmes. » Est donc née une nouvelle image. « J’ai travaillé avec deux jeunes filles à Bordeaux autour d’un lac et on a trouvé ce moment où elles se coulent l’une l’autre dans une embrassade. C’est une relation proche, entre deux êtres qui se font confiance et participent à un jeu d’enfant dangereux. Et puis, il y a aussi cette notion d’aller au fond des choses. N’ayons pas peur d’aller sous la surface et vers le bas. »
Cette nouvelle création, tel un tableau posé, « n’est pas une fresque à message » poursuit Rouge. « C’est une représentation poétique de plusieurs choses spirituelles, philosophiques et mythologiques. De plus en plus, dans mes œuvres, il y a un rapport entre humain et non humain autour de l’idée de perméabilité et d’interdépendance. Dans cette image, il y a tout ça : l’immersion, se dissoudre, se mêler l’un à l’autre. »
Reste à retranscrire ce message profond par la technique. Cette fois encore, pas de spray mais uniquement de la peinture. « Pour attaquer le crépi, j’ai d’abord passer des grosses couches de fonds pour ensuite trouver une surface plus lisse et fluide. » Avec quelles couleurs ? « J’ai décidé de beaucoup refroidir l’eau et de réchauffer les lumières. Je souhaite créer un décalage entre une eau hivernale et un soleil de fin d’été, jouer avec les teintes orange et turquoise. »
Pour ajouter avec plaisir une 71ème œuvre d’art au musée à ciel ouvert boulonnais. « C’est un privilège d’être ici » insiste Rouge. « J’ai été super très bien accueillie par l’équipe du festival. Côtoyer tous ces artistes a été une chance et des moments riches partagés. Cela a permis d’échanger et de se remettre en questions pour découvrir les cultures des autres. »
Rendez-vous au numéro 148 du Boulevard Chanzy pour découvrir une nouvelle œuvre d’art du musée en plein air qu’est devenu Boulogne-sur-Mer.